Al-Ahram Hebdo           30/09/2015

Randa Kassis, présidente du mouvement de la Société pluraliste et ancien membre du Conseil national syrien, affirme que certains pays doivent assumer leurs responsabilités, notamment sur la montée du radicalisme. Pour elle, il faut être réaliste et négocier sans conditions préalables avec Bachar Al-Assad et les partis modérés.

 

Al-Ahram Hebdo : Que pensez-vous du rôle de la Russie en Syrie, notamment suite au soutien militaire renforcé pour soutenir le régime sur le terrain ?

Randa Kassis : L’intervention russe en Syrie consiste principalement à lutter contre Daech, ce qui était nécessaire puisque la coalition internationale contre l’Etat islamique s’est révélée inefficace. J’espère que la Russie nous aidera à trouver une solution politique durant les mois à venir.Les discussions d’Astana 2 s’inscrivent dans ce processus de solution politique négociée. Le président du Kazakhstan, Nazarbayev, a bien voulu faciliter ce processus qui mènera, j’espère, à la paix.

— Quelle est votre vision de cette paix en Syrie ?

— Le mouvement de la Société pluraliste est persuadé que la solution ne peut être que politique et appliquée par étape. Suite à l’escalade militaire, un statu quo s’est installé. La seule solution consiste à poursuivre le processus politique en restant pragmatique et raisonnable. Dans quelques jours, la conférence d’Astana 2 aura lieu, et un certain nombre de forces de l’opposition se rassembleront afin de se mettre d’accord sur un plan réel et réalisable.

— Qu’en est-il du processus de Moscou et quelle est la position des participants à l’égard de la Conférence de Genève ?

— Les réunions de Moscou 1 et 2 ont brisé le gel entre les opposants et le régime syrien. Le but était de relancer le processus de Genève 3 sur les principes de Genève 1. Hélas, cela est un peu prématuré et le terrain n’est pas encore propice à une telle réunion sous l’égide de l’Onu.

— Estimez-vous donc que l’envoyé spécial des Nations-Unies, De Mistura, n’a pas réussi à faire avancer la situation ?

— De Mistura fait de son mieux afin de relancer le processus politique. Je salue ses efforts, mais les nombreux obstacles imposés notamment de la part du régime, ainsi que de la Coalition nationale syrienne l’empêchent d’aboutir, ce qui est regrettable.

— L’opposition syrienne ne craint-elle pas que la Syrie ne se transforme en un nouvel Afghanistan suite à l’intervention russe ?

— La situation en Afghanistan est bien différente de la Syrie, surtout la structure sociale du pays.

— La communauté internationale semble changer de position vis-à-vis de Bachar Al-Assad …

— Lorsque nous parlons d’une solution politique, nous parlons d’une solution négociée avec le régime syrien puisque ce dernier contrôle toujours la capitale et 20 % du territoire syrien. Il est bien évident que nous devons accepter de négocier sans aucune condition préalable afin d’enclencher un réel processus. Le réalisme doit prendre le pas sur le rêve.

— Que reflète ce revirement important de la position d’une partie de la communauté internationale ? Un changement de tactique ou une nouvelle prise de conscience avec un mea culpa vis-à-vis des réfugiés ?

— La crise en Syrie touche beaucoup de pays. La montée du radicalisme, l’appel au djihad et la crise des réfugiés qui arrivent par centaines de milliers en Europe mettent certains pays face à leurs responsabilités. L’opposition politique syrienne, comme l’ensemble des puissances régionales et occidentales doivent revenir à un certain réalisme si elles souhaitent une solution réelle dans les plus brefs délais.

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